La famille Zouari, invitée surprise aux commandes de Picard
Nos élus en sauront un peu plus lors du CSE extraordinaire qui aura lieu le 23 octobre prochain. Mais en attendant, on peut entrevoir ce qui nous attend.
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La famille Zouari, invitée surprise aux commandes de Picard
Le couple Zouari, qui préside le principal master franchisé de Casino en France, va racheter 43 % de Picard Surgelés. Une opération menée au nez et à la barbe de très grands opérateurs. Lion Capital, l’actionnaire majoritaire, semble parier sur ce spécialiste du commerce alimentaire pour dynamiser l’enseigne et se trouver une porte de sortie. Le couple ZOUARI Le couple ZOUARI Le chiffre 156 M € : la somme déboursée par la famille Zouari pour acquérir 43,3 % de Picard Surgelés auprès du groupe suisse Aryzta, qui empoche aussi 91 M €de dividendes et garde 4,5 % du capital. Mais Picard porte aussi un peu plus de 1,4 Mrd € de dettes, ce qui valorise l’entreprise à environ 1,9 Mrd € «Personne ne l’avait vu venir », commente, bluffé, un professionnel des fusions-acquisitions, expert de la distribution. Le rachat de 43,3 % du capital de Picard Surgelés par la famille Zouari, signé dans la nuit du 3 octobre et officialisé le 4 au matin, a surpris tout le monde. C’est en effet ce très discret spécialiste français du commerce de proximité – il préfère dire « de précision » – qui a réussi à convaincre le groupe suisse Aryzta de lui céder une grande partie des 48 % qu’il détenait dans le capital du champion français des produits surgelés.
Sur le papier, le groupe familial Zouari, partenaire de Casino depuis vingt ans dans le commerce alimentaire, ne faisait pourtant pas vraiment le poids – malgré ses quelque 400 magasins Franprix, Monop’ et Monoprix détenus en propre, ses 180 Leader Price coexploités avec Casino et son milliard et demi d’euros de chiffre d’affaires – face aux grands fonds d’investissement internationaux et à quelques familles du commerce français qui convoitaient également Picard. L’américain Blackstone, un fonds chilien, la famille Moulin, propriétaire du groupe Galeries Lafayette, et une riche famille du monde du luxe auraient en effet figuré parmi les postulants.
Surtout, le montant de l’acquisition représente une somme jugée modeste par bon nombre d’experts. En 2010, Lion Capital avait racheté l’entreprise, qui se classe régulièrement en tête du classement des enseignes préférées des Français, pour près de 2 milliards d’euros. Aryzta était, lui, entré chez Picard sur une base de valorisation de 2,2 milliards d’euros. La famille Zouari n’aura déboursé, elle, « que » 156 millions d’euros pour racheter 43,3 % du capital à Aryzta (qui empoche aussi 91 millions d’euros de dividendes et garde une modeste participation de 4,5 %). « Mais à ces sommes s’ajoutent un peu plus de 1,4 milliard de dettes portées par les différentes holdings de Picard, relativise un très bon connaisseur du dossier, ce qui valorise la boîte à environ 1,9 milliard d’euros. » « Cela reste néanmoins une très bonne affaire et un superbe coup si le plan de développement imaginé par le repreneur porte ses fruits », commente un expert.
« Le projet d’une vie »
Un coup en tout cas très bien préparé. « Ça fait au moins dix ans que je rêve d’acheter cette enseigne, confie Moez-Alexandre Zouari à LSA en aparté de l’inauguration de son dernier bébé, le Monop’ de la rue Saint-Dominique à Paris (lire p. 32). C’est le projet d’une vie. La façon dont Picard a résisté à la crise de la viande de cheval, quand toutes les autres marques de surgelés accusaient des chutes dramatiques, a achevé de me convaincre de la solidité des fondations de cette entreprise. Le management et les équipes sont excellents, la R & D est top avec le renouvellement chaque année de 250 recettes, dont 90 innovations, sur une offre de 1 200 références et les emplacements sont exceptionnels. »
L’annonce, il y a deux ans, de l’intention du suisse Aryzta, trop endetté, de céder sa participation dans Picard, incite la famille Zouari à se lancer, persuadée qu’après les passages successifs de trois fonds d’investissement à la tête de l’entreprise depuis 2001 – Candover, BC Partners puis Lion Capital –, l’avenir de Picard passait par une solution industrielle et familiale.
Alors que ses concurrents font le siège du groupe suisse à Zurich, Moez-Alexandre Zouari décide, lui, de partir à Londres rencontrer Lyndon Lea, le patron de Lion Capital, pour lui expliquer son projet et le convaincre de l’appuyer. « Le rendez-vous prévu sur vingt minutes s’est prolongé une heure et demie, se souvient l’entrepreneur. Il a apprécié ma détermination et nous avons commencé à travailler sur les sujets de fond et sur un projet industriel que j’étais le seul à défendre, en nous interrogeant sur la façon dont Picard pouvait encore se développer autour d’axes comme la nutrition, le bio, la santé, l’e-commerce, la livraison à domicile et les diversifications comme la restauration, l’épicerie, les vins… »
Le nouvel actionnaire de référence de Picard ne donnera pas plus de détails sur ses projets, préférant en réserver la primeur au personnel de l’entreprise, qu’il doit rencontrer dans les prochains jours. Mais on peut raisonnablement penser que l’enseigne de surgelés bénéficiera à plein des expériences de diversification menées par la famille Zouari (restauration, livraison en moins d’une heure…). Car pour conforter Lion Capital dans son choix d’appuyer la candidature de cet invité surprise aux manettes de l’entreprise, il va s’agir d’intensifier le développement d’une enseigne riche de 11 millions de clients, portée par des tendances favorables et dont le chiffre d’affaires 2018 a encore progressé de 3,8 % à 1,4 milliard d’euros. Le tout pour un Ebitda qui, selon nos informations, a certes fléchi de 4 % en 2018, à un peu plus de 190 millions d’euros, en raison essentiellement des conséquences des manifestations des « gilets jaunes », mais devrait atteindre 220 millions cette année, soit un taux de rentabilité opérationnelle record dans l’alimentaire de près de 15 % !
Une belle endormie