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La famille Zouari fait une entrée choc dans le bazar

Coup sur coup, la famille Zouari vient de racheter Maxi Bazar et Dya Shopping et d’entrer en négociations exclusives pour reprendre Stokomani. Elle a de bonnes raisons de s’intéresser à ce secteur porteur, mais le défi est de taille.



11,7 Mrds € C'est le poids du marché du bazar discount en France en 2021 (20 Mrds € de potentiel d’ici à la fin des années 2020) Source : Xerfi

Les enjeux

  • Délaissé par les hypers, le secteur du bazar connaît une croissance sans faille depuis une quinzaine d’années. Et elle n’estpas près de s’arrêter : les tensions sur le pouvoir d’achat et l’engouement des Français pour leur intérieur vont continuer de le rendre attractif.

  • Atomisé, le bazar discount n’avait pas fait l’objet de rachats importants, mis à part celui de Tati par GiFi, les opérations en régions de Centrakor et la reprise de Babou par B & M. Les Zouari enclenchent un mouvement de concentration qui a tardé à venir.

  • C’est un secteur rentable, en attestent les niveaux d’Ebitda annoncés par Stokomani (autour de 10 %) et Maxi Bazar (15 %).


L’argent n’est pas fait pour dormir, mais pour être investi. Or la famille Zouari, depuis son ­désengagement partiel de sa ­master-franchise au sein du groupe Casino, fin 2019, n’en manque pas. La question, alors, était de savoir vers quels marchés ses investissements allaient se porter. Après Picard Surgelés fin 2019, la réponse est… le bazar non alimentaire. Coup sur coup, les Zouari viennent de racheter deux « petits » acteurs de ce secteur, Maxi Bazar (200 millions d’euros de chiffre d’affaires, 30 millions d’Ebitda) et Dya Shopping (20 millions d’euros de chiffre d’affaires environ), et d’entrer en négociations exclusives pour la reprise de Stoko­mani (un peu moins de 600 millions d’euros de CA pour, dit-on, 60 millions ­d’Ebitda). Si l’acquisition de cette dernière enseigne s’effectue, alors les Zouari avanceront sur ce marché avec une force de plus de 800 millions d’euros, pour quelque 240 magasins. De quoi les installer au quatrième rang du secteur en France, derrière Action et ses 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires, GiFi, aux alentours de 1,5 milliard d’euros, et au coude à coude avec Centrakor et ses 900 millions d’euros. Un GiFi que les Zouari lorgneraient également. Selon des concurrents, ils auraient mis sur la table 300 à 350 millions d’euros pour s’emparer de Stoko­mani, 130 à 140 millions pour Maxi Bazar et auraient proposé 1,5 milliard d’euros pour GiFi. Philippe Ginestet, le président fondateur, en réclamerait 1,8 milliard d’euros… Selon une source proche des Zouari, qui dément l’offre sur GiFi, ces chiffres seraient nettement surévalués.


Que les Zouari s’intéressent à un secteur dont les meilleurs acteurs dégagent des rentabilités à deux chiffres n’a pas grand-chose d’étonnant. Mieux : le marché du bazar est de l’ordre de 11,7 milliards d’euros annuels en France, et le gâteau devrait grandir encore : certains avancent le cap des 20 milliards d’euros pour la fin de la décennie. « C’est un secteur tendanciellement dynamique, et pas seulement en France, mais ­aussi ailleurs, en Europe et aux États-Unis, confirme Yves Marin, associé chez Bartle. Il est porteur par son concept même, basé sur de petits achats pas chers et pas culpabilisants. » Cédric Ducrocq, président du cabinet de conseil Diamart, ne dit pas autre chose : « Le recentrage sur la maison, depuis le début de la crise sanitaire, a dopé la croissance, mais elle était déjà bien présente : ce n’est pas un phénomène conjoncturel, et il n’y a aucun signe d’essoufflement. »


Un jeu entre spécialistes Abandonné par les enseignes alimentaires, le marché du bazar avance sans avoir trop à se soucier d’une concurrence extérieure : le jeu s’effectue entre spécialistes. À cela, une bonne raison : « C’est un secteur qui nécessite un savoir-faire spécifique avec la maîtrise d’une chaîne de valeur lean de bout en bout. La condition sine qua non pour avoir en rayons des produits low cost, c’est d’avoir soi-même une organisation low cost, indique Yves Marin. Cela rend le modèle difficilement copiable. » Pour y entrer, le plus simple est encore de s’appuyer sur des acteurs déjà implantés. Cela tombe bien, « le secteur reste étonnamment peu concentré », comme le souligne Cédric ­Ducrocq. « Derrière GiFi et Action, il y a de nombreux acteurs de taille moyenne, dont certains très performants, comme Stokomani, mais aussi La Foir’fouille ou Centrakor. Tout le monde s’attendait à une concentration depuis plusieurs années. Elle a même plutôt tardé à venir », analyse-t-il. Ce ventre mou du marché est constitué « d’enseignes entre 300 et 500 millions d’euros de chiffre d’affaires, qui ont besoin d’un effet de cliquet pour passer la vitesse supérieure, mais qui ont du mal à franchir seules ce cap », avance Yves Marin. Et pour ces acteurs, c’est le meilleur moment pour vendre. « Elles ont une activité résiliente et des trésoreries importantes, ayant bénéficié de deux années ultra­favorables avec trois à cinq mois de fermeture sur deux ans, moins de salaires à payer, des loyers revus à la baisse et des aides de l’État », fait remarquer Olivier Rondolotto, PDG de Centrakor.


Quelle cohérence ? D’après certaines sources, en 2019, Maxi Bazar perdait 6 millions d’euros… loin des 30 millions d’euros d’Ebitda annoncés aujourd’hui. De quoi faire dire à certains que les prix d’achat prêtés à la famille Zouari sont un peu élevés… La grande question, désormais, c’est l’après. L’acquisition de ces enseignes hétéroclites permettra-t-elle de former un tout cohérent ? La complémentarité géographique entre Maxi Bazar, Dya Shopping et Stokomani suffira-t-elle ? « Stokomani et Maxi Bazar ont des modèles très différents, je serais surpris qu’ils veuillent les fusionner », pointe Cédric Ducrocq. « Maxi Bazar, ce sont des formats de 200 m² à 4 000 m², avec une forte présence en Suisse et un prisme sur la décoration et le mobilier. Stokomani, de son côté, a un format plus unifié, autour de 1 800 m², mais fait un tiers dans le textile, un tiers dans la maison et un tiers dans les PGC. Pas simple de rapprocher les deux », confirme Olivier Rondolotto. Dans ce contexte, quelle organisation trouver aux achats ? C’est pourtant le nerf de la guerre. « La course est engagée depuis plusieurs années, avec des modèles très divers reposant plus ou moins fortement sur du sourcing lointain. GiFi et Action, chacun à leur façon, ont un back-office très robuste. D’autres sont plus légers, par exemple Maxi Bazar, qui était très dépendant des grands importateurs comme JJA », appuie Cédric Ducrocq. Stokomani, de son côté, doit sa fortune aux lots d’invendus. L’ennui, c’est que ces derniers sont plus difficiles à trouver, notamment parce que les industriels produisent bien mieux qu’avant, c’est-à-dire au plus près de leurs besoins.


Troisième question : la course à la taille critique. Depuis 2012, relève Xerfi, « le parc cumulé des quinze plus grands réseaux a plus que doublé » pour dépasser les 4 000 magasins en France… Et un Action, parti de zéro en 2012, pour arriver à plus de 600 points de vente aujourd’hui, a bousculé le secteur. « La vitesse d’action est reine. La clé n’est pas d’ouvrir un magasin, d’attendre de voir si ça fonctionne et ensuite d’ouvrir un deuxième. Non, il faut en ouvrir beaucoup, afin de mailler rapidement le territoire et, pour cela, avoir les reins solides », explique Yves Marin. Ce qui signifie que si les Zouari veulent rivaliser, il va leur falloir sortir le portefeuille et procéder à de nombreuses inaugurations avec, à l’appui, des plates-formes logistiques taillées pour suivre la cadence. Une chance dans ce combat qui s’annonce : Stokomani est bien pourvu avec de lourds investissements sur deux nouvelles plates-formes, l’une de 72 000 m² et l’autre de 75 000 m², pour compléter les 50 000 m² initiaux. Une rentabilité à la baisse L’ennui, car il peut y en avoir un, c’est que la forte croissance du parc commence à entraîner des répercussions : les chiffres d’affaires par magasins, quand bien même le gâteau grossit, peuvent s’inscrire à la baisse. De quoi poser la question de la pérennité de certains ? « Le maillage du territoire n’est pas terminé, et il n’y a pas de problème de rentabilité à venir », balaie Olivier Rondolotto qui, en 2021, a ouvert 21 magasins Centrakor et entend poursuivre sur cette lancée avec, au moins, une dizaine de points de vente supplémentaires cette année


Les Zouari, pour construire un poids lourd du bazar discount, devront nécessairement en faire autant. Ils devront, aussi, se démarquer de la concurrence. En appuyant encore plus fortement que les autres sur le modèle du petit prix du déstockage et du discount ? « Dans un pays où 40% de la population a du mal à terminer ses fins de mois, cela aurait du sens », note un expert du marché. Aller plus loin dans l’économie circulaire, en donnant un écrin physique à la seconde main, pourrait être une autre piste.


Les défis Avec 4 000 magasins de bazar discount en France, le maillage du territoire est déjà bien avancé. La course à la taille se situe donc plutôt du côté de la logistique et des achats, surtout à l’import. Or, Maxi Bazar et Stokomani fonctionnent de manière différente : le premier passe par un grossiste, JJA, le second a bâti son modèle en rachetant des lots d’invendus, notamment dans le textile. Fusionner deux enseignes aussi différentes paraît improbable tant les modèles diffèrent, par la taille des magasins et par le fonctionnement. Le rachat de GiFi, pour lequel une proposition de 1,5 milliard d’euros aurait été faite, changerait les choses. La réponse passe peut-être par l’évolution de ces modèles de bazar, vers la seconde main et l’économie circulaire.


Deux enseignes rachetées coup sur coup en décembre…

Maxi bazar

  • 89 magasins

  • 200 M€ de CA

  • Prix estimé d’achat : entre 130 et 140 M€

Dya shopping

  • 8 magasins

  • 20 M € de CA

  • Prix estimé d’achat : NC

… et une négociation exclusive pour une troisième

Stokomani

  • 130 magasins

  • 600 M€ de CA

  • Prix estimé d’achat : entre 300 et 350 M€

Le poids potentiel du nouvel ensemble

  • 820 M€ de CA

  • N°4 du marché, derrière Action, GiFi et Centrakor


Jean-Noël Caussil et Magali Picard

Source : https://www.lsa-conso.fr/la-famille-zouari-fait-une-entree-choc-dans-le-bazar,400606



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